Lunch: a History, de Megan Elias

Après la fascinante histoire du petit-déjeuner, place au déjeuner (ou “dîner”, en Belgique)! L’autrice de ce livre publié en 2014 était interrogée sur l’histoire de ce repas, trop souvent pris devant mon ordinateur en ce qui me concerne, dans un épisode du podcast The Food Chain de la BBC (que j’aime beaucoup). Ni une ni deux, je me suis empressée de me procurer sa version numérique de son livre, que j’ai rapidement lu, avec intérêt et jubilation.

Dans cet ouvrage, Megan Elias, Professeure à l’Université de Boston, démarre son récit en Mésopotamie, nous rappelle que, pendant longtemps, on ne mangeait que deux repas par jour et que l’institutionnalisation du déjeuner tel que nous le connaissons aujourd’hui est relativement récente, à l’échelle de l’humanité. Mais revenons à la Mésopotamie car quand, comme moi, on s’intéresse à l’alimentation en général (et qu’on ne parle que de ça, ajouterait mon compagnon de route) et aux fromages au lait cru en particulier, on apprend très vite que c’est là que la domestication des animaux et la production fromagère ont commencé. Dans ses recherches, Megan Elias nous confirme que le premier déjeuner des bergers mésopotamiens consistait en du pain et du fromage, repas que nombreux d’entre nous retrouve dans leur “boîte à tartines” (ou, pour les non Belges, lunch box). Cette image forte d’un déjeuner pris il y a des millénaires, et semblable dans sa composition à ce que je peux manger ou préparer pour mes enfants, m’a évidemment parlé et profondément marquée. Par ailleurs, le pain et le fromage sont également les ingrédients de base de ce que l’on appelle en Angleterre, et que je connaissais pas, le traditionnel “ploughman’s lunch”.

J’étais également heureuse - et surprise! - d’apprendre que l’avènement du déjeuner tel que nous le connaissons aujourd’hui en Occident repose notamment sur une innovation apportée par la Révolution française: le “déjeuner à la fourchette”. Alors que les débats à l’Assemblée Nationale de 1789 s’éternisent et que l’heure du deuxième repas de la journée, initialement consommé à 15h, est décalée à 17h, les Parisiens introduisent ce nouveau repas mangé avec une fourchette, donc, au milieu de la journée, pour tenir le coup. Nouvelle habitude alimentaire observée par des visiteurs britanniques et consignés dans leurs carnets de voyage. Intéressant, non?

Alors que j’ai rapidement parcouru le chapitre dédié aux livres de recettes sur ce qu’il convient de manger au déjeuner, le dernier chapitre du livre consacré à la place réservé à ce repas dans les Arts m’a captivée. Il y est évidemment question du Déjeuner sur l’herbe de Manet, mais aussi des Moissonneurs de Pieter Bruegel, ou du Déjeuner de jambon de Nicolas Lancret. Grâce à ce formidable chapitre, je tenterai de rester plus de dix secondes devant une nature morte la prochaine fois que je me rends dans un musée. Un exploit. Le passage où Megan Elias évoque les repas des personnages de Jane Austen m’a évidemment parlé mais ce que je dois dire que c’est la toute fin de ce chapitre, consacré au déjeuner en tant qu’institution à Hollywood, qui m’a fascinée et m’a fait penser à bien des égards aux “business lunches” bruxellois bien que parfois, contrairement à Hollywood où il faut à tout prix être vu dans certains restaurants, lobbyistes, journalistes ou décideurs sont parfois désireux de se retrouver au calme, loin de l’attention des observateurs du quartier européen où tout le monde se connait.

Je lis assez peu de non-fiction de manière générale mais ce livre fouillé, écrits avec sérieux et un soupçon de malice m’a fait passer un formidable moment de lecture et d’apprentissage. Ce qui n’est vraiment pas rien.

Suivant
Suivant

Mon mois de février sous la neige